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16 novembre 2019
Alain Lipietz

L’affaire du "trou" Bd Chastenet de Géry

Le trou qui s’est formé sous le boulevard est l’occasion d’une fanfaronnade du maire, mais qui pose de vrais problèmes sur le financement des travaux de voierie.

La Ville de Villejuif est bâtie sur d’anciennes carrières de gypse. De plus le gypse tend à former des grottes sous l’action de l’eau. Bref, Villejuif est construit sur un gruyère, et depuis longtemps des trous se forment, des chaussées s’affaissent. C’est le cas à Chastenet de Géry depuis plusieurs mois. On peut passer en voiture, mais les bus ne passent plus. Il faut combler ce trou, mais qui va payer ?

Combien ça coûte ?

Selon le Grand Orly Seine Bièvre (le GOSB), établissement qui a la « compétence voierie », de 5 à 7,5 millions. C’est énorme.

Pour donner une idée, j’ai eu à suivre, en tant que vice-président de la Géothermie, le comblement de la grotte découverte sous l’endroit où nous devions construire l’usine de la Géothermie de Villejuif. Ce chantier nous a retardés plusieurs mois. 149 forages à 38 mètres sous terre, 520 mètres cubes de gravas à injecter (un cube de 8 mètre de côté, comme une maison R+2)… Coût : 300 000 euros. Le trou sous Chastenet de Géry est donc énorme, il faudra refaire la rue, et le coût 20 fois plus important.

Qui doit payer ?

C’est là que ça se corse. Il y a une vingtaine d’année, la réponse était claire : c’est une voie communale, donc c’est Villejuif. Depuis la création de la Communauté d’Agglomération du Val de Bièvre (CAVB), la voirie est passée sous la compétence de cette structure intercommunale. Mais quand la CAVB a été absorbée, au 1er janvier 2016, par l’Établissement Public Territorial (EPT 12) Grand-Orly-Seine-Bièvre, que s’est-il passé ?

La voirie n’est pas une compétence obligatoire des EPT. Mais bien sûr les maires de la CAVB n’avaient pas vraiment envie de récupérer les travaux de voierie, et le maire de la plus grosse ville, Villejuif, encore moins que les autres. Il a été décidé que le GOSB récupérerait la voierie de la CAVB. Oui, mais avec quel budget ?

Il faut rappeler ici que ces Établissements publics territoriaux, subdivisions de la Métropole du Grand Paris, sont des monstres administratifs, une des pires inventions des socialistes sous la présidence Hollande : des « Établissements Publics de Coopération Intercommunale sans fiscalité propre », contrairement aux Communautés d’Agglomération, qui se votaient leur budget, y compris leurs recettes (des % ajoutés aux taxes municipales). Le GOSP n’a pour recettes que ce que les Villes veulent bien lui accorder. Ça se négocie en permanence dans un Machin appelé la CLECT.

Dans le cas de la voierie, il a été convenu entre F. Le Bohellec, maire de Villejuif, les autres maires, et le président du GOSB, que Villejuif contribuerait au GOSB de la même façon que pour la CAVB et en recevrait la même quantité de travaux de voierie annuelle.

Nous avions espéré que la création du GOSB permettrait une plus grande mutualisation des ressources entre les communes. Ce ne fut pas le cas. Au nom de la « coopérative de maires » (point d’accord entre les communistes et la droite), chacun cotise le moins possible et demande le plus possible de travaux.

On se trouve donc dans la situation où Villejuif verse la même contribution moyenne au GOSB qu’à la CAVB, et est en droit de demander la même longueur de réparation de ses rues que en moyenne les années précédentes. Et quand il se passe un coup dur, comme sous Chastenet de Géry ? Le cas n’est pas prévu ! On a mutualisé les dépenses « normales » (ce qui abaisse en effet les coûts), mais on n’a pas mutualisé les gros risques.

Pourquoi la polémique ?

Évidemment le plus sage est de couper la poire en deux pour financer cette grosse tuile : le GOSB fait un effort particulier pour Villejuif cette année, et Villejuif lui apporte une contribution exceptionnelle pour faire réparer son trou. C’est d’ailleurs exactement ce que fait le maire de Villejuif quand il proclame mettre 3 millions sur la table, c’est à dire la moitié du coût.

Alors où est le problème ?

Le problème est d’abord une question de style : F. Le Bohellec présente ça comme un défi, dans une intervention parfaitement ridicule sur sa page Fancebook (voir ici le lien sur Le Parisien). Genre « Moi je fais les travaux que ces incapables du GOSB ne font pas, grâce aux économies accumulées par ma bonne gestion ». Et le président du GOSB a beau jeu de lui répondre : « Nous n’avons pas de ressource propre, on ne peut faire des travaux à Villejuif qu’avec l’argent que Villejuif nous verse. »

Sur le fond, les problèmes sont multiples. D’abord F. Le Bohellec parle comme si l’argent était à lui. Non, c’est l’argent des Villejuifois, que depuis 5 ans il gère à tort et à travers, prenant un retard énorme sur les investissements. Ainsi, il avait accumulé au 30 septembre dernier 36 millions d’euros non dépensés. Comment ?

-  En maintenant une hausse des impôts locaux de 800 000 euros par an décidée en 2014 quand la situation était critique : elle ne l’est plus !

- En laissant vacant une centaine de postes de salariés déjà budgétés, qu’il jure régulièrement d’embaucher au plus vite, ce que plus personne ne croit. Cela va du personnel d’entretien des écoles, dont l’absence — parmi d’autres formes de mépris — provoque la colère des parents et des directeurs, aux cadres qui auraient dû programmer les travaux, d’où les énormes retards à réaliser le budget d’investissements.

Cette cagnotte, le maire comptait pouvoir la dépenser à sa guise en travaux cosmétiques à but électoral. Il s’est pour cela octroyé une enveloppe de 5,4 millions pour « petits travaux de voierie ». Il s’est ainsi affranchi de la délégation de la voirie au GOSB, entamant lui-même des travaux rue de Chevilly, sans coordination avec le reste du monde. Le résultat fut désastreux, les Villejuifois payant 2 fois les travaux dans cette rue (3 fois avec les taxes finançant les travaux du métro).

Depuis il se concentre sur le centre-ville et les quartiers où il pense avoir son électorat Les Réublicains, comme le Lion d’Or (voir l’analyse des votes par quartier, ici). Pendant ce temps les quartiers le plus périphériques, où les nids de poule éclosent au long des rues et des trottoirs, sont laissés à l’abandon, alors même qu’on pouvait autrefois les faire réparer immédiatement par les propres salariés de la Ville (« en régie »).

Mais pour le moment il n’a plus de majorité, il n’a pas pu faire voter son budget modificatif le 30 septembre, et ne l’a pas mis à l’ordre du jour pour le conseil municipal de novembre. Il n’a même pas mis ces 3 millions à l’ordre du jour. Il ne pourra donc pas disposer de sa cagnotte sans commettre une faute.

Peut-être le fond du problème

De toute façon, ces 3 millions ne sont qu’une partie du coût des travaux. Qu’en ferait-il ? Entamer des travaux, s’arrêter au bout de trois millions, et dire aux entreprises : « Pour la suite, débrouillez-vous, voyez le GOSB » ?

Et c’est cela le plus inquiétant : il en est capable ! C’est à ça qu’on le reconnait.

Mais alors quelle différence y a-t-il entre « Verser au GOSB les 3 millions pour un chantier à Villejuif dont le maitre d’ouvrage serait le GOSB » et « Commencer tout de suite les travaux à hauteur de 3 millions sans passer par le GOSB » ? Eh bien, comme l’a fort bien expliqué le président du GOSB dans une lettre aux Villejuifois quand F. Le Bohellec a commencé son petit jeu (attaquer « l’inertie du GOSB » pour jouer les Sauveurs ) : le contrôle des marchés des entreprises.

Lettre de M. Lepretre, président du GOSB

Je m’explique.

Quand le GOSB décide des travaux sur un secteur dont il a la responsabilité, il lance un appel d’offre public, plusieurs entreprises concourent, la Commission d’Appel d’Offre se réunit (j’en suis), on choisit le mieux offrant en qualité/prix. C’est grâce à cette mise en concurrence qu’on obtient des baisses de prix importantes, car le GOSB représente un gros, gros, marché (on le découpe en lot parfois pour faire travailler de petites entreprises).

Ce que veut F. Le Bohellec, ce qu’il pratique depuis des mois avec une entreprise comme Fayolle par exemple (pour citer celle qui apparaît le plus souvent sur ces « petits travaux de voierie »), c’est traiter « d’homme politique à entreprise ». Pas forcément l’intérêt des habitants…

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