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Conseil municipal du 21-26 juin 2018 (3)

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28 juin 2018
Alain Lipietz

Natalie Gandais privée de protection fonctionnelle

Comme prévu, le maire et la plus grande partie de sa majorité privent Natalie Gandais de la protection fonctionnelle à laquelle elle a droit, face aux menaces qu’elle a subi pour l’empêcher de dénoncer le délit de favoritisme dans un gros marché de travaux public.

Ce gros marché, c’est évidemment celui de la Halle des sports (tout est raconté là). De par ses fonctions de première adjointe et de par l’article 40 du Code de Procédure Pénale, comme de par son éthique de citoyenne, Natalie Gandais avait le devoir de signaler ce délit à la Procureure de la République. Le maire et un de ses adjoints, E. Obadia, l’ont menacée de destitution si elle faisait son devoir. Et comme elle l’a fait, ils l’ont débarquée, avec le soutien du groupe Vidal (actuellement La République en Marche). Ce qui a provoqué l’éclatement de l’Union citoyenne, notre association ne pouvant tolérer l’improbité : on n’a pas été élus pour ça.

Mais Natalie n’avait pas les moyens de payer un avocat et ne s’est pas portée partie civile, ce qui l’a empêchée d’avoir accès au dossier. Elle a découvert le mécanisme de la « protection fonctionnelle » (c’est à dire que la Ville doit payer les frais d’avocats de ses élus et des fonctionnaires face aux menaces) quand les élus de la majorité y ont eu recours, en avril dernier.

Quand Natalie a déposé une demande de protection fonctionnelle, le maire a d’abord refusé, arguant que dorénavant elle ne couvre que les membres de l’exécutif (ce qui est contesté). Natalie ayant rappelé que précisément elle était membre de l’exécutif au moment des faits, le maire a reculé et mis sa demande au vote de ce conseil municipal.

Mais au moment du vote, à 13 heures 30 le mardi 26 juin, c’est à dire au bout de 8 heures et demi d’un conseil municipal commencé le jeudi précédent , les oppositions sont parties travailler. Nous n’avons plus que 3 représentants en salle, portant 6 mandats. Nous savons que le maire va voter et faire voter contre. Pourtant il n’a plus aucun argument puisqu’il admet que Natalie y a droit, étant première adjointe au moment des faits. Il est donc intéressant de rester pour connaître ses arguments. Voici mon intervention :

C’est le fidèle allié du maire, A. Caporusso, qui répond au nom de celui-ci. Je résume : « Oui, étant première adjointe au moment des faits, Mme Gandais avait droit de demander la protection fonctionnelle. Mais nous sommes constants dans notre position : elle n’est plus adjointe, donc nous pensons qu’elle n’y a pas droit, donc nous votons contre. »

Les trois élus d’opposition sont soufflés, une partie de la « majorité » est mal à l’aise devant une telle mauvaise foi. On vote : les 3 élus d’opposition présents (Sandra da Silva, JF Harel et moi) apportent leurs 6 voix, 2 membres de la majorité votent pour la protection fonctionnelle, 1 s’abstient. Natalie Gandais aurait eu la protection fonctionnelle si... les oppositions n’avaient pas dû partir travailler (la plupart n’ont posé qu’une demi-journée de congé, tandis que les élus de la majorité, presque tous membre de l’exécutif, sont rémunérés pour être là).

« Tout le monde sait » ou doit savoir (il suffit de consulter un moteur de recherche pour retrouver les articles du Courrier des maires) que, par arrêt du Conseil d’Etat, « La demande de protection fonctionnelle n’est enfermée dans aucun délai ». On peut la demander bien après les faits, et même après le jugement, même après la fin d’un mandat, et quel que soit le poste ou l’absence de poste désormais occupé par le demandeur ou la demanderesse, et même après le décès de l’intéressé, ou si son procès est déjà perdu ! Et cette jurisprudence ne dit pas seulement qu’on "peut" la demander" tardivement, mais qu’on y a droit. Encore faut-il que :
- la menace subie le soit dans l’exercice de ses fonctions
- et en l’absence de faute personnelle détachable de la fonction,
- Elle ne peut alors être refusée que pour des causes d’intérêt général, ce qui est exceptionnelle.

C’est de cela et rien d’autre que doit juger le conseil municipal en accordant ou pas cette défense fonctionnelle. Rien de tout cela (et pour cause !) dans l’intervention de M. Caporusso.

Concernant la réserve « en l’absence de faute personnelle détachable », il est par exemple à noter que le maire, sans passer par le conseil municipal, avait demandé à la directrice du service juridique, dès le début de « l’affaire du fond » (le favoritisme allégué dans l’octroi du marché de la Halle des sports), de recourir aux services du cabinet d’avocats de la Ville contre Mme Gandais. La directrice, qui avait discrètement souligné certaines des fautes commises à l’occasion de ce marché, a catégoriquement refusé une telle demande et a par la suite quitté la Ville.

A. Caporusso vient donc de raconter un absurde bobard.

Lui et celles et ceux qui l’ont suivi viennent ainsi de rejoindre le maire et E. Obadia dans le délit d’« entrave à signalement » prévu dans la nouvelle loi de protection des lanceurs d’alerte, article 13. Comme je dois signaler ce délit à la Procureure, je demande à consulter l’enregistrement de l’intervention de A. Caporusso. Bravache, celui me donne le texte qu’il a lu. Le voici :

On remarque qu’il s’agit d’un texte couvrant l’ensemble des interventions possibles de la « majorité » sur le sujet, sans doute préparé par le cabinet du maire (même si l’on peut prêter au cultivé A. Caporusso la référence initiale à The Importance of Being Earnest d’Oscar Wilde !)

Je remarque aussi que A. Caporusso n’a pas prononcé les derniers mots, demandant un vote secret pour que chacun.e soit libre. Deux élues et demi de la « majorité » ont cependant voté publiquement en faveur de Natalie Gandais…

Du même coup, il n’a pas prononcé la dernière phrase renouvelant l’accusation du maire contre Natalie Gandais (partie pour une autre réunion) de tentative de « détournement d’argent public. » Il y a sans doute une limite au dégoût de soi…

Enfin, je remarque que le maire avait prévu de dire (si l’on abordait « l’affaire [de la Halle des sports] au fond ») : “ Accorder la protection fonctionnelle, c’est seulement permettre à la justice d’être rendue. » Exactement. Donc il s’est opposé consciemment à ce que la justice soit rendue.

À suivre

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